ADN «Tourisme durable» : Céline Arnal
Thèmatique : Acteur associatif Portrait Projet solidaire Territoire
Profondément méditerranéenne, Cécile Arnal aime la mer et particulièrement la Grande Bleue qu’elle sillonne depuis toujours pour la beauté de ses grands fonds et cette population de cétacées qu’elle ne se lasse pas d’observer. Plongeuse, amatrice de voile, chercheuse en écologie marine, il était impensable que sa vie soit ailleurs. Océanologue un temps, elle découvre l’écovolontariat lors d’un séjour à la Barbade et décide courant 2005 de fonder Cybelle Planète afin de conjuguer sa formation scientifique et son envie de partager ses connaissances. Depuis, sous la houlette de son association, de plus en plus de volontaires participent à des sorties en mer, suivent des programmes de préservation de la biodiversité ou collectent des données afin d’observer l’évolution de la biodiversité marine.
Un ancrage scientifique avant le grand plongeon
Scientifique de formation, Céline Arnal se spécialise sur le comportement animal et l’écologie marine. Son expérience lui permet alors d’enchainer les missions scientifiques, et c’est à force de voyager, notamment dans les pays anglo-saxons, qu’elle découvre le monde de l’écovolontariat alors quasiment inconnu en France. « Les chercheurs utilisaient les données récoltées par les écovolontaires, un moyen pour eux d’agir concrètement ; et j’ai pensé qu’on avait tous un jour ressenti ce besoin d’action concrète. » La jeune femme est justement à un tournant de sa vie. La recherche fondamentale est passionnante mais il lui manque cette sensation de s’investir concrètement, d’avoir un pied dans une action directe pour la biodiversité et l’environnement. Le déclic va venir d’une nouvelle mission, alors qu’elle travaille en océanologie et participe à une expédition en mer pour la création du sanctuaire marin de Pelagos. Cette zone de protection marine située entre l’Italie, Monaco et la France s’inscrit dans un programme de protection des mammifères marins. Lors de sa réalisation, Céline encadre plusieurs sorties en mer avec des bénévoles qui aident au recensement des cétacées. Ce statut d’éco-guide achève de la convaincre de l’intérêt des actions participatives. Elle comprend que sa place est là: monter des programmes participatifs pour travailler en lien avec la recherche et la protection de la biodiversité. En 2005, elle crée Cybelle Planète, l’implante à Villeneuve-lès-Maguelone, entre Montpellier et Sète, et prend la barre. Cap sur l’écovolontariat !
Cybelle planète : une vague ascendante
Lorsque Cybelle Planète est créé, l’écovolontariat est presque inconnu en France. Il y a tout à faire. Très vite, Céline rejoint un réseau hollandais, Ecovolunteer (qui n’existe plus aujourd’hui), qui lui permet de nouer des partenariats avec l’étranger. En 2007, elle peut se verser son premier salaire et peu à peu, son activité se met à croitre. « Quand j’ai créé Cybelle Planète, c’est en totale inconscience, j’y ai mis mon énergie, ma passion, j’avais juste envie d’avoir un métier qui me plait, de faire quelque chose de plus concret pour la biodiversité, de répondre à d’autres questions, et petit à petit, je suis entrée dans le monde associatif, j’ai rencontré des gens, et cela m’a donné envie d’aller toujours plus loin dans le participatif. » L’époque est aussi à l’émergence d’internet, du collectif, qui va aider à faire connaitre l’activité. En 2008 Céline recrute sa première salariée. Elles sont aujourd’hui cinq et l’an dernier, Cybelle a fait partir 350 volontaires sur un panel de 22 missions œuvrant à la préservation de la biodiversité : projets de recherche et d’étude, refuges d’animaux, Parcs Naturels….
L’ écovolontariat, un pavé dans la mer ?
Toutefois, et ce malgré la progression constante de son activité, Céline a conscience que l’écovolontariat reste peu connue voire mal compris du grand public. Afin de tenter d’y mettre un peu de sens, elle crée courant 2013 le « Collectif Francophone d’Ecovolontariat » avec quelques collègues tels Volontaires pour la Nature et Project Abroad : « J’en avais marre de baigner dans le vague, que l’écovolontariat reste une activité mal définie. J’ai eu envie de rencontrer d’autres structures pour que l’on soit le plus nombreux possible à participer à cette réflexion. Notre objectif n’était pas de créer un label ou une grille contraignante mais un outil qui donne des valeurs de base pour les structures d’écovolontariat. » Une fois de plus, Céline privilégie le participatif, près de 400 personnes assistent à un débat en ligne et la charte voit le jour. « On a travaillé pour la communauté mais toutes les structures ne nous ont pas suivi. » Une définition est toutefois adoptée, qui stipule que “L’écovolontariat est une action solidaire et participative qui consiste à aider, durant son temps libre, un projet lié à la préservation et à la valorisation de la diversité animale, végétale, environnementale, et culturelle. L’écovolontaire est un citoyen engagé et bénévole et ne peut, à ce titre, recevoir de contrepartie financière pour son action.“ Au moment où les dérives du tourisme humanitaire ou volontourisme sont régulièrement dénoncés dans les médias, la vigilance de Céline Arnal semble avoir été prémonitoire.
L’évidence durable
Quant au tourisme durable, c’est une évidence pour Céline : « Nous sommes adhérents à VVE depuis le début, on répond complètement à leurs critères. » De fait, comment imaginer une association qui propose des voyages visant à rejoindre des structures locales pour aider à la préservation de la faune et de la flore oublier l’angle environnemental ? « Tout est évidemment pensé dans le respect de la nature, l’hébergement, la nourriture, ce n’est pas qu’on veut vendre de l’écologie mais c’est le cœur du projet. » Cybelle dispose aussi d’une grille de référence pour ses partenaires sur la thématique du durable. Et si Céline Arnal accepte et assume totalement le fait que l’écovolontariat a aussi une dimension touristique, ne serait-ce que par l’agrément tourisme que se doivent d’avoir toutes les structures, ce n’est pas le cas de tous ses collègues, qui ont encore trop tendance à diaboliser ce mot. « Pour moi l’écovolontariat est un mode de tourisme participatif et solidaire, une forme de tourisme responsable, mais la majorité de mes collègues a encore peur de ce mot. Toutefois, je n’ai pas l’impression d’être un opérateur de tourisme, je suis chercheur, et pour ne pas perdre cette base qui me passionne, j’ai entrainé dans l’aventure les volontaires intéressés. » Céline ajoute, taquine, que le tourisme durable, comme la Journée de la Femme, sera une victoire le jour où cela n’existera plus et où l’on en parlera plus, d’ailleurs elle récuse cette Journée de la Femme qu’elle trouve très péjorative…
Les yeux vers un horizon toujours plus participatif
Enfin, au-delà de l’écovolontariat, Céline a aussi crée tout un programme de science participative, Cybelle Méditerranée, qui consiste à suivre l’état de la biodiversité du large, à récolter des données grâce à la participation des citoyens, et à les mettre librement à la disposition des scientifiques. « Nous faisons non seulement participer les écovolontaires mais aussi les plaisanciers qui, grâce à une application mobile, peuvent nous signaler leurs observations. » Ce programme citoyen permet donc à tout un chacun de s’impliquer, sans forcément monter sur un des voiliers de l’association, et aide à constituer une importante base de données sur la faune marine. Et Céline Arnal ne compte pas s’arrêter là sur le participatif, imaginant aussi l’amener jusqu’à l’intérieur de son association, qui comprend donc aujourd’hui cinq salariés. « J’ai quatre salariés avec qui j’ai envie de faire de plus en plus de participatif, me délester pour que ce projet, à l’image du Collectif d’Ecovolontariat, devienne le projet de plein de gens au-delà de moi… » Se délester aussi pour retrouver le temps de partir, car trois sorties de 10 jours en mer ne suffissent plus à la femme passionnée qu’est Céline Arnal. On sent qu’elle rêverait de reprendre le large pour un temps long, mieux se fondre dans l’horizon avec la liberté insolente de cette faune marine qu’elle aime et qu’elle protégera toujours. Contre vents et marées…
——— ALLER PLUS LOIN ———–
http://www.cybelle-planete.org/
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Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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