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La biodiversité est-elle soluble dans le tourisme ?

| Publié le 8 octobre 2012
             

Comment valoriser et préserver des espaces sensibles dans des communes et sur des littoraux où la population est multipliée par dix pendant les mois d’été ? Comment rapprocher élus, gestionnaires d’espaces naturels, professionnels du tourisme et associations naturalistes qui œuvrent sur ces mêmes territoires ? Pour répondre et échanger sur toutes ces questions, la communauté de communes Océan-Marais de Monts et la SEM (Société d’Economie Mixte de Saint-Jean-de-Monts) avaient réuni le mercredi 3 octobre lors d’un colloque portant sur « Tourisme et Biodiversité » tout un panel d’associations et de professionnels venus témoigner de leur expérience.

Colloque Tourisme & Biodiversité

Marais doux @Océan-Marais de Monts

St Jean de Mont, des hommes et des espaces

Située sur le littoral vendéen, la commune de Saint-Jean-de-Monts compte 18 000 habitants à l’année et 200 000 en saison touristique, soit 130 000 lits disponibles pour accueillir ces hôtes supplémentaires : la 2e capacité d’accueil de France après le Cap d’Agde et la 1ère pour l’hôtellerie de plein air 3-4 étoiles. Cet afflux massif de touristes pendant la saison estival n’est toutefois pas anodin car il se produit sur un littoral fragile et dans une région à fort caractère. De fait, la communauté de communes Océan-Marais de Monts est à 80% composée d’espaces sensibles : marais humides, forêts, massifs dunaires, des ensembles naturels à  la biodiversité fragile et qui, au-delà de la préservation, pose de façon urgente la question du tourisme tel qu’il est pratiqué.

Stratégie politique et nature frondeuse

Sur l’aspect préservation, la communauté de communes avait invité Françoise Peyre, de la DREAL (Ministère de l’Ecologie), pour présenter la stratégie nationale pour la biodiversité. Mise en place en 2011, elle vise à préserver l’existant en privilégiant les espèces menacées et le milieu  naturel remarquable. En Vendée, près de 90% du littoral est classé Natura 2000 et nombre de communes sont donc concernés. Un appel à projet a eu lieu fin 2011 visant à restaurer les sites dégradés. Deux projets vendéens ont été retenus dont l’un sur le massif dunaire du Pays de Monts. Pour un budget de 286 000 € sur deux ans (80% du montant total du projet), l’Etat allié à de nombreux partenaires (ONF, LPO…) va ainsi aider la région à restaurer ce site Natura 2000, dans une dynamique qui inclut une zone de protection spéciale et une zone de conservation (oiseaux et habitats), pour ne pas mettre de côté la dimension humaine et culturelle.

Colloque Tourisme Biodiversité

Bergeronnette printanière @Louis-Marie Préau

Des mesures concrètes ont donc été mises en place comme le nettoyage manuel des plages pour préserver les laisses de mer, la préservation d’espèces comme le gravelot à collier (oiseau nicheur), le pélobate cultripède (petit amphibien), l’euphorbe péplis (plante dunaire)…, la protection des dunes avec des tracés fonctionnels vers les plages en lien avec des spécialistes de l’évolution dunaire (pose de ganivelles et de fils lisses) mais aussi la communication et la sensibilisation du grand public. Reste toutefois le problème des espèces invasives (ragondin, jussie, écrevisse de Louisiane), soulevé par la Maire du Perrier, qui déplore une restauration tronquée si l’on ne gère pas en parallèle ce fléau : « On nous demande de préserver le milieu mais celui-ci se dégrade sans cesse du fait de ces espèces invasives ».

La voix de l’état reste pour l’heure assez fataliste. Françoise Peyre : « Nos projets prennent en compte ces espèces et le traitent en partie mais on ne se débarrassera jamais d’espèces comme la jussie ou les écrevisses de Louisiane. Si on aidait là-dessus, on ne ferait plus que ça. » Est-il vraiment possible, ou pas, de venir à bout de ces plantes et animaux nuisibles et est-ce le rôle de l’état, pas facile de répondre. Où l’on sent une frustration locale et légitime, et une impuissance nationale et…. sincère ? On s’interroge…

Initiatives et résistances régionales

A une échelle plus locale, le colloque a aussi permis de mettre en lumière de nombreuses initiatives visant à revenir vers notre sujet central – soit la préservation d’un site naturel remarquable et sa gestion du public dans l’objectif, toujours, de respecter la biodiversité ambiante. Anne-Laure Blouët a ainsi présenté le Parc Naturel Régional de Brière dont elle est directrice et qu’elle gère dans une optique responsable. A cette fin, le lieu s’est doté depuis peu d’une maison du parc (dans le village de Kerhinec) qui permet de sensibiliser 105 000 visiteurs par an à la découverte durable (observation des oiseaux, promenades guidées en chaland, travail avec les scolaires de la région, édition de topoguide de randonnées pédestres ou à vélo, formations, stages, réintroduction des élevages bovins sur marais et valorisation du produit à l’échelon local).

Benoit Poitevin, directeur de l’Ecomusée du Marais Salant, a quant à lui présenté le Projet Ecosal Atlantis qu’il a coordonné au niveau national. Doté d’un important budget de l’Europe (3 millions d’euros), ce projet transnational (Royaume Unis, France, Espagne et Portugal) vise à faire découvrir les salines traditionnelles de ces quatre pays, des salines qui seront bientôt intégrées à une Route du sel inaugurée courant 2013. Douze espaces salicoles (actifs ou non) ont ainsi été répertoriés avec pour chacun, une évaluation de la biodiversité. Cette dernière a permis, pour les sites qui ne l’avaient pas encore fait, de faire un diagnostique sur la flore et la faune locale. Ici, la biodiversité est donc clairement envisagée comme un atout touristique puisqu’en investissant ces zones salicoles, les visiteurs aident aussi à sa préservation.

Maison de la Dune et de la Forêt

Exposition « Les pieds dans le sable ». Maison de la Dune et de la Forêt. St Jean-de-Mont.

Ateliers et échanges en guise de final

L’après-midi, des ateliers plus participatifs ont permis de découvrir d’autres acteurs comme les pôles nature de Charente et du parc de l’Estuaire qui tentent de développer un autre tourisme, privilégiant le contact avec la nature et des territoires plus méconnus pour mieux répartir les flux du tourisme et déconcentrer les plages. A nouveau, l’argument d’un tourisme plus doux, de nature, permet à ces pôles de préserver le patrimoine biologique et d’empêcher le surinvestissement immobilier. Souvent au cœur d’espaces naturels fragiles, ils visent à sensibiliser public et scolaires mais aussi à protéger les espèces migratoires et la flore endémique. Au parc de l’Estuaire, situé dans un ancien domaine privé, la biodiversité a même été stimulée par la création de mares, de prairies fleuris, et l’ajout d’abris, de nichoirs et de refuges. La fréquentation de ces pôles reste toutefois encore limitée et certains habitants locaux n’ont pas toujours conscience de leur existence, ce qui pose une fois de plus la question de la communication mais aussi, des publics visé. Ne peut-on pas être touriste dans son propre territoire ?

La journée s’est finalement achevée par une visite furtive de la Maison de la Dune et de la Forêt, amenée à devenir la Maison du Littoral et de la Forêt et de l’Ecomusée du marais vendéen du Daviaud. Animés par des médiateurs passionnés, ces lieux sont aussi d’autres façons d’appréhender St Jean de Mont. Au-delà des guérites des maitres nageurs surveillant la plage, il y a aussi les allées et venues de naturalistes capables, sur une zone précise, de repérer le chant des grenouilles, entre Crapaud calamite, Pelotabe Cultripède, Grenouille de Perez, Grenouille rieuse, verte, de Lesson et tant d’autres.  Parce qu’il n’y a pas que la plage et les bains de mers.

EN SAVOIR PLUS

Participation au forum : 156 personnes                                                  Soit 140 participants et 16 conférenciers

 


La biodiversité est-elle soluble dans le tourisme ? | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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