Les colonies de vacances : un enjeu de poids pour une société apaisée et harmonieuse
A l’heure où bien des parents rêvent de souffler quand dans le même temps de nombreux enfants ont des envies d’ailleurs sans pouvoir toujours les satisfaire, réjouissons nous que les « colonies » de vacances soient toujours là et bien là ! Certes, elles ont évolué, tout comme la société et le profil des familles, mais elles restent encore et toujours une extraordinaire occasion de faire vivre aux plus jeunes des temps de loisirs et de découvertes doublés de projets sociaux et éducatifs qui ont un grand mérite : permettre à l’enfant de se construire hors du cadre familial et lui offrir une expérience de vie en communauté qui, qu’elle quelle soit, le transformera durablement et le fera grandir. Or un enfant épanoui, si on le multiplie par le million d’enfants et d’ados qui partent en colo chaque année, c’est autant de futurs citoyens armés pour imaginer une société apaisée et harmonieuse.
La colo n’a pas dit son dernier mot…
Il faut changer notre regard sur les colonies. Et d’ailleurs, beaucoup d’organisateurs lui préfèrent d’ores et déjà le terme « séjour de vacances » et des vocables apparentés qui ont le mérite d’éviter un lexique quelque peu poussiéreux qui tendrait à nous ramener à ces séjours d’un mois aux confins de la Creuse ou de la Dordogne, empilés dans des dortoirs à 18, à griller des saucisses au feu de bois… finalement d’excellents souvenirs, mais pas toujours facile à faire « comprendre » à une société de plus en plus axée sur les loisirs et le plaisir facile. Et pourtant, loin des idées reçues, les colos n’ont pas dit leur dernier mot. Elles ont même décidé de se rebeller, à l’image de nos vignerons condamnés par le phylloxéra à la fin du 19e et qui ont su rebondir, s’unir, mutualiser pour mieux se diversifier. Lors du dernier colloque de l’UNAT, le 18 novembre dernier, Patrick Drouet (Président de la commission vacances-ados de l’UNAT) l’a bien spécifié : « On parle toujours du passé, de la fin des colos, mais qui communique sur une vision moderne des colonies, les nouvelles mobilités, le développement des courts séjours, mieux vaut moins de colos mais plus de qualité ! »
Les jolies colonies de vacances, merci la CAF, merci l’UNAT… »
Car la colonie, c’est bien plus qu’un « séjour de vacances », c’est un lieu de mélange, de mixité sociale, mais aussi la possibilité pour de nombreuses familles d’envoyer leurs enfants en vacances grâce au soutien des CAF, des CE, des collectivités territoriales. A Toulouse par exemple, grâce à un programme d’aide au départ initié dès 1996, axé sur un partenariat avec la SNCF, l’UNAT, la CAF et la région Midi-Pyrénées, près de 37 000 jeunes de 6 à 14 ans ont pu partir en vacances jusqu’à aujourd’hui. Et au-delà des collectivités territoriales, de nombreux projets pilotes sont à l’étude, à l image du projet B-Come mis en place par l’association Citizen Corps, qui propose un programme citoyen à des jeunes de 15 ans alliant séjour sportif, découverte du territoire et défi d’action citoyenne. A l’image aussi d’associations telles Maison de Courcelles, qui propose des séjours où l’enfant est accompagné, peut prendre son temps, afin d’évoluer à son rythme et pas toujours à marche forcée en enchaînant les activités. Et si les organisateurs de séjours n’ont cessé de se multiplier, avec une immense variété de propositions, d’organismes, publics et privés, des fourchettes de prix très larges, 88% des familles n’aurait pas pu faire partir leur enfant en colonie sans une aide ou une prise en charge partielle du prix du séjour. En 2015, l’enveloppe des CAF pour l’aide au départ a totalisé 22 millions d’euros en 2015 sans compter le budget additionnel dédié aux équipements.
Les colos : bien s’informer & qui contacter ?
Reste pour les parents à trouver la bonne information et la formule la plus appropriée à leur progéniture quand on sait que chaque année, en France, 42 000 séjours sont organisés par des associations (65%), des collectivités territoriales (17%), des privés (11%) ou des comités d’entreprise (7%). Le choix est donc vaste, évidemment plus facile pour les bourses les mieux garnies, mais vaste malgré tout quand plus d’un million d’enfants et d’ados partent en colo chaque année. Côté collectivités territoriales, les informations sont souvent à chercher auprès des mairies, qui possèdent encore parfois des centres de vacances qu’elles arrivent tant bien que mal à garder dans leur patrimoine, à l’image de la ville de Gentilly, qui se bat pour garder ses trois centres, ce qui lui permet de faire partir chaque année plus de 300 enfants. Du côté des organismes sociaux, on reconnait toutefois avoir du mal à toucher toutes les familles qui auraient pourtant droit à des aides. Dans un entretien qu’il nous avait accordé l’an passé, Patrick Drouet soulignait le rôle crucial des assistantes sociales en ce sens ainsi que celui des salariés de services jeunesse/enfance des communes ou des comités d’entreprise. Pour les séjours privés, le recours à internet s’avère plus facile mais il faut ensuite arriver à démêler les offres des nombreux sites et en ce sens, l’UNAT a mis en place un site qui regroupe de nombreuses possibilités de séjours tous publics (en annexe).
Un zest de philosophie et une cuillère à soupe d’harangue publique
Reste à donner les moyens aux colonies de continuer à exister pour tous les publics ! Et c’est là un réel enjeu de société… Lors du colloque du 18 novembre, un brillant exposé d’Olivier Prévot (maitre de Conférences en sciences de l’éducation) a mis en lumière le fait qu’un enfant passe 20% de son temps dans sa classe – et donc que 80% du temps restant est dédié au périscolaire, aux loisirs et au temps parental. Alors que faire de ce temps ? Comment l’appréhender ? On imagine qu’il est bien difficile pour un éducateur quel qu’il soit (animateur du périscolaire, moniteur de colonie, parent, grand-parent, etc.) de répondre seul à ce temps libéré. Les colonies apparaissent alors naturellement comme l’une des solutions pour imaginer des temps utiles, éducatifs, porteurs de sens (le débat sur contenu des colonies mériterait évidemment un autre article plus affiné), pour prendre aussi le relais de l’école et des parents. Car les colonies permettent à la fois de soulager des parents (couples en manque de temps à deux, parents isolés…) qui ont bien besoin de temps de répit mais aussi de donner d’autres référents aux enfants, de les rendre autonomes, de leur offrir des ailleurs, des occasions d’échanger avec d’autres jeunes issus d’autres quartiers, d’autres horizons, et ainsi de se faire une idée plus complète du monde.
Il faut donc plus que jamais remettre au gout du jour le bonheur des colonies, mieux communiquer sur les organisateurs, qui ils sont, où les trouver, associer aussi les parents trop peu entendus, trop peu écoutés, et faire en sorte que les pouvoir publics et les élus s’emparent aussi de la question. Car, la colonie rejoint ici l’enjeu de l’école, de l’éducation, et d’une société qui court après ses problèmes en oubliant de les anticiper. Il faut passer du curatif au préventif a exprimé Mr Prévot. Il faut du courage et des choix politiques ont redit à la tribune les élus de Toulouse présents au colloque. Il faut également être malin, mutualiser, collaborer, coopérer clame l’UNAT. De fait, quelle société voulons-nous pour demain ? Une société ultra sécurisée, de repli sur soi, de peurs ou une société harmonieuse, de mélange, de partage ? Partir en colonie, c’est déjà un début de réponse, un début de solution. Alors, ne vaut-il mieux pas griller quelques saucisses au feu de bois que se gaver d’antidépresseurs en attendant que le ciel nous tombe sur la tête… !!?
———— ALLER PLUS LOIN ——-
Retrouver des séjours et colonies via l’UNAT sur ce lien : : vacances-enfants-ados.com
Citizen Corps : bcome2017@gmail.com
Maison de Courcelles : www.maisondecourcelles.fr
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
Les 5 derniers articles de Geneviève Clastres
- Le goût de la Corée
- Les hôtels de luxe peuvent-ils être des hôtels robin des bois ?
- Les étudiant(e)s de l’IREST développent trois outils au service des professionnels du tourisme responsable (ATR).
- Automne enchanté au Parc ornithologique du Marquenterre
- Quand une MJC meurt, c’est un quartier qui brûle…
Voir tous les articles de Geneviève Clastres
Découvrez nos abonnements
15 voyages sélectionnés par Voyageons-Autrement.com
Informations utiles pour voyager
10 conseils aux voyageurs responsables pour venir au Canada 10 conseils aux voyageurs responsables pour venir au Canada ~ par Mélanie Darrieumerlou...
Partir en colonie de vacances avec l’UNAT ! Suite au colloque du 20 novembre organisé par l'Union Nationale des Associations de Tourisme et de plein air (UNAT) qui a réuni plus de 200 acteurs du secteurs des vacances...
Vacances et congés scientifiques avec Objectifs Sciences Eveiller les enfants à la recherche pendant leurs vacances, voilà le pari que relève l'association Objectif Sciences International. ~ par Rédaction Voyageons-Autrement...
Le Khaïma Hôtel Bio Découverte, un hôtel aux préoccupations écologiques Le Khaïma Hôtel Bio Découverte est installé en plein cœur du Parc National Souss Massa à 800m de l’océan, de ces falaises, ces plages...
Comment vous allez sauver les dauphins de Sataya... (épisode 2) "Vous avez une chance folle" commente Valérie Valton. Désolés pour nos prédécesseurs, mais c’est le principe même de la rencontre avec les animaux...
La brise de mer rouvre ses portes Le 6 juillet dernier, à St Michel-Chef-Chef (Loire-Atlantique), la « Brise de Mer a rouvert ses portes après 18 mois d’interruption. Un lieu unique dans le Grand Ouest légué en 1912...